Contrôle fiscal : se préparer, s’entourer, anticiper…
Avec Sylvain de Chaumont, avocat associé Oratio Nantes
La réception d’un avis de vérification est annonciatrice d’une vérification de comptabilité imminente dans l’entreprise. Si ce contrôle fiscal reste un événement normal dans la vie de l’entreprise, il n’en demeure pas moins qu’il doit être préparé avec minutie, comme va nous l’expliquer Sylvain Chaumont, avocat associé chez Oratio.
O’News. Première question : le contrôle fiscal d’une entreprise suppose-t-il systématiquement la visite d’un vérificateur ?
Sylvain Chaumont : Le contrôle fiscal peut prendre différentes formes. Il pourra, tout d’abord, s’agir d’un contrôle sur pièces qui consiste, pour l’administration, à effectuer des contrôles de cohérence sans nécessairement se rendre dans l’entreprise. Il pourra ensuite s’agir d’un contrôle sur place (ce que l’on appelle juridiquement une « vérification de comptabilité »), qui suppose ici la visite d’un vérificateur dans les locaux de l’entreprise.
Dans cette dernière hypothèse, l’annonce d’une visite prochaine d’un vérificateur est précédée, sauf dans l’hypothèse d’un contrôle inopiné, de l’envoi d’un avis de vérification de comptabilité.
O’N : Pourquoi l’envoi ou la remise d’un avis de vérification est-il obligatoire ?
O’N : Jusqu’où peut remonter le vérificateur ?
S. Chaumont : L’administration ne peut rectifier les impôts et taxes de l’entreprise qu’à l’intérieur d’un certain délai, appelé « délai de reprise » : une fois ce délai expiré, elle perd son droit de rectifier les impôts et taxes de l’entreprise pour les années ou exercices concernés. Ce délai de reprise diffère selon les impôts.
O’N : Quels conseils donneriez-vous à nos lecteurs qui se retrouveraient ainsi confrontés à l’imminence d’un contrôle fiscal de leur entreprise ?
S. Chaumont : Entre le moment où l’entreprise reçoit un avis de vérification et la date de la première visite du vérificateur, il doit s’écouler un délai minimum raisonnable que le juge de l’impôt a fixé à 2 jours. Ce délai s’impose à l’administration pour que le dirigeant puisse contacter son conseil qui l’assistera dans le cadre des opérations de contrôle.
Même si l’administration préconise un délai d’au moins 15 jours à ses agents, et même s’il est toujours possible de demander un délai supplémentaire, il n’en demeure pas moins que le temps laissé au dirigeant pour se préparer au contrôle est relativement court. Il faut réagir vite. C’est pourquoi l’un des premiers réflexes préconisés est de contacter rapidement son conseil habituel. Il ne faut pas négliger cette possibilité : le suivi du contrôle fiscal est un exercice de style qui peut receler quelques pièges et difficultés. Rompu à ce type d’exercice, le conseil pourra assister le dirigeant sur le déroulement du contrôle, l’informer sur des points de procédure, le conseiller sur les réponses à apporter au vérificateur, voire même se charger de suivre la vérification de comptabilité en se posant comme l’interlocuteur principal du vérificateur.
Il sera également nécessaire de définir les conditions matérielles du déroulement du contrôle, préparer et réunir l’ensemble des documents demandés par le vérificateur qu’il faudra mettre à sa disposition lors de sa première visite (documents comptables des exercices concernés par le contrôle, le dossier juridique de l’entreprise, etc.). Il peut être utile à ce stade de valider avec le conseil le contenu des documents à transmettre et la correcte mise à jour du dossier juridique de l’entreprise (rapports de gestion, registre d’assemblées, etc.).
S. Chaumont : Les entreprises qui disposent d’une comptabilité informatisée ont l’obligation de remettre au vérificateur, au début des opérations de contrôle, une copie des fichiers des écritures comptables (FEC) sous forme dématérialisée répondant à des normes techniques précises. Attention : le défaut de présentation de la comptabilité sous forme dématérialisée ou la remise de fichiers des écritures comptables non conformes sont sanctionnés par une amende de 5 000 € ou, en cas de rectification et si le montant est plus élevé, par une majoration de 10 % des redressements.
Le contrôle effectué par le vérificateur nécessitera alors la réalisation de traitements informatiques. 3 possibilités sont prévues, le choix revenant au dirigeant : soit il autorise le vérificateur à effectuer le contrôle sur le matériel de l’entreprise ; soit il décide que les traitements informatiques seront effectués par les propres moyens de l’entreprise et, dans ce cas, le vérificateur doit préciser par écrit les travaux à réaliser ainsi que le délai accordé pour les effectuer ; soit il demande à ce que le contrôle ne soit pas effectué sur le matériel de l’entreprise : il doit alors mettre à la disposition de l’administration les copies des documents, données et traitements soumis au contrôle.
Dans tous les cas, le vérificateur a l’obligation de décrire, par écrit, la nature des investigations souhaitées, de manière à ce que le dirigeant puisse faire le choix sur les modalités de traitement en toute connaissance de cause.
O’N : Enfin, dernière question, combien de temps peut durer ce contrôle ?
S. Chaumont : Par principe, un contrôle peut durer tout le temps que le vérificateur estime nécessaire pour mener à bien ses investigations, si ce n’est qu’il doit respecter le délai de reprise pour procéder à d’éventuelles rectifications fiscales
Cela étant, la loi a spécifiquement prévu un cas pour lequel la durée de la vérification sur place des entreprises commerciales, industrielles, artisanales agricoles ou qui exercent une activité libérale ne pourra pas excéder 3 mois : si ce délai n’est pas respecté par le vérificateur, les impositions complémentaires éventuellement mises à la charge de l’entreprise sont nulles.
Sont concernées par cette garantie les entreprises dont le chiffre d’affaires hors taxes, en 2017, est inférieur à 789 000 € (pour les entreprises industrielles ou commerciales dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures ou denrées à emporter ou à consommer sur place, ou de fournir le logement), 238 000 € (pour les entreprises prestataires de services et les entreprises exerçant une activité non commerciale) ou 352 000 € (pour les entreprises agricoles).
Lé délai entre la réception d’un avis de vérification et le début des opérations de contrôle peut être relativement court. Mettez à profit ce temps pour appeler votre conseil habituel, réunir les documents réclamés par le vérificateur, préparer les conditions matérielles du contrôle dans l’entreprise, etc.
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